Les différents modèles de psychothérapie se sont progressivement orientés vers une évaluation de leur efficacité « basée sur les preuves », comme c’est le cas en médecine. Nous ne pouvons que nous en féliciter : mieux vaut une évaluation de l’efficacité à partir des résultats obtenus dans les règles de l’art de la recherche scientifique que pas d’évaluation du tout.
Pourtant, se baser uniquement sur l’efficacité d’une démarche thérapeutique recouvre un problème de taille : en négligeant la compréhension des mécanismes d’action d’une psychothérapie, nous risquons de limiter les avancées futures. Aucune réponse définitive n’a été formulée pour résoudre les troubles psychologiques. En ne s’intéressant qu’à l’efficacité et en négligeant l’étude des moyens d’action, impossible de généraliser ces processus pour découvrir des méthodes plus efficaces.
C’est le propos de Daniel David et Guy H. Montgomery, qui proposent que l’évaluation des psychothérapies soit basée sur les preuves de leur efficacité (« evidence-based »), mais aussi sur la validité de leur modèle théorique. Il existe en effet trop d’exemples de propositions psychothérapeutiques qui agissent sur les troubles mais mettent en avant un modèle théorique qui n’a jamais été testé, a été réfuté, ou propose même des éléments d’explication en contradiction avec les connaissances fondamentales déjà rassemblées.
Aussi, une proposition psychothérapeutique sérieuse ne peut se contenter d’évaluer son efficacité. Elle se doit aussi de tester les mécanismes d’action qu’elle suppose être déterminants de l’efficacité observée. On ne peut que soutenir David et Montgomery en appelant chaque clinicien à un degré d’exigence quant aux modèles thérapeutiques auxquels il a recours : au minimum, si les hypothèses théoriques sur lesquelles s’appuie la proposition thérapeutique ne sont jamais évaluées par une recherche fondamentale sérieuse, ou sont clairement invalidées par la recherche ou les connaissances disponibles, éviter de promouvoir cette proposition thérapeutique. Si elle présente une certaine efficacité dont on pourrait se satisfaire à court terme, les allégations théoriques infondées d’une démarche thérapeutique ne peuvent que contraindre la recherche dans une inertie fatale à l’avancée des connaissances.
L’article est disponible ici
David, D., & Montgomery, G. H. (2011). The Scientific Status of Psychotherapies: A New Evaluative Framework for Evidence‐Based Psychosocial Interventions. Clinical Psychology: Science and Practice, 18(2), 89-99.
Sur le même thème, vous pouvez aussi lire mon éditorial dans le Journal de Thérapie Comportementale et Cognitive de décembre 2013.