Protéger son empathie

La théorie des cadres relationnels analyse l’empathie comme le produit de changements de perspective le long des cadres déictiques interpersonnel (je < > vous), spatial (ici < > là-bas) et temporel (maintenant < > avant/après). Pour envisager ce que l’autre pense, ressent, imagine, croit, etc., il faut se représenter le monde depuis son point de vue, à un autre moment et dans un autre lieu que celui où on se trouve soi-même.

En se représentant ce que vit l’autre, nous effectuons une sorte de « mouvement » verbal qui produit en nous de nouveaux stimuli, et notamment qui peut déclencher en nous des émotions. Ces émotions peuvent être identiques ou non à celles que l’autre est en train de vivre, mais surtout, elles peuvent être désagréables, voire douloureuses.

Aussi, le travail d’empathie du thérapeute dans l’ACT ne consiste pas uniquement à se mettre à la place de l’autre en voyageant depuis son propre point de vue jusqu’à celui du patient. Il consiste aussi à être d’accord d’y vivre des émotions dont on se passerait volontiers. Ainsi, on apprend que les étudiants en médecine ont tendance à perdre leurs compétences en empathie au fur et à mesure de leurs études. Vous avez bien lu. Deviennent-ils insensibles à la souffrance de leurs patients ? J’en doute. Plus vraisemblablement, ils apprennent progressivement à ne plus appliquer leurs compétences à adopter la perspective de l’autre, afin de moins ressentir. En clair, l’évitement d’expérience gagne la bataille.

En psychothérapie, et plus généralement dans les professions de soin et d’aides aux autres, être capable d’adopter le point de vue de l’autre n’est vraisemblablement pas suffisant. Encore faut-il associer à ces compétences une bonne dose d’acceptation des émotions qui apparaissent en nous chaque fois que nous développons notre vision du monde depuis le point de vue de celui qui nous raconte sa souffrance.

L’objectif est alors de protéger ses compétences en empathie par un développement des compétences à accueillir les émotions qui vont se présenter, afin que se mettre à la place de l’autre continue à nous être utile, ainsi qu’à nos patients.

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Photo : Lucxama Sylvain

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